mercredi 28 novembre 2012

Blackbird - Harrower - Lucernaire





Dix-huit ans se sont écoulés, un homme et une jeune femme se retrouvent, ils se sont aimés, mais la société les a condamnés pour cet amour. Lui, a fait de la prison pour viol, elle, a subi un examen médical traumatisant. Parce que voilà, elle avait 12 ans et lui 40.
Les retrouvailles sont froides, Una (Charlotte Blanchard) est déterminée, Ray (Yves Arnault) voudrait la voir partir, il lui explique qu’il a beaucoup de travail et n’a pas de temps à lui accorder et d’abord comment l’a-t-elle retrouvé ?

Ils ne se sont pas revus depuis le procès, elle n’a pas pu y assister et demande des comptes à Ray. Pourquoi l’a-t-il abandonnée dans cet hôtel sinistre ? Elle lui raconte tout ce qui s’est passé depuis, ses parents qui n’ont pas voulu déménager du quartier, tout le monde lui a tourné le dos, même sa meilleure amie. Elle a été souillée.

Bien sûr, de tous temps, les petites filles ont eu un « béguin » pour une idole de la chanson, d’un feuilleton. Una était-elle vraiment amoureuse de Ray ? Elle s’ennuyait à la fête organisée par ses parents, et cet adulte est venue la trouver, lui parler comme à une grande.

Un adulte se doit de résister à ses pulsions, par malheur Ray a franchi le pas qui l’a conduit à six ans de prison.

L’amour est-il éteint entre eux ? Una n’a pas de relations sérieuses, Ray a trouvé une femme qui sait tout de lui, il tente de reconstruire sa vie, il a changé de nom.

Le sol du local est jonché d’ordures, de canettes, de reliefs de repas, le seul moyen de se défouler, ils le trouvent en tapant et renversant les poubelles comme des gamins, ça leur fait du bien et de parler aussi. Ils sont un moment apaisés.

On est touchés, révoltés aussi, le thème de la pièce est difficile, les acteurs ont l’humanité qu’il faut et la mise en scène les aide en cela. La fin de la pièce est ambiguë, à vous de choisir et de penser ce qui doit se passer derrière la porte du local…

jeudi 22 novembre 2012

Des souris et des hommes - Steinbeck - Théâtre 14







Adaptation de Marcel Duhamel

Mise en scène Jean-Philippe Evariste et Philippe Ivancic

Direction d’acteurs Anne Bourgeois

Avec
Jean HACHECandy

Jean-Philippe EVARISTE  George

Philippe IVANCICLennie

Agnès RAMYLa femme de Curley

Henri DÉUSLe patron

Jacques BOUANICHCarlson

Emmanuel DABBOUSCurley

Hervé JACOBIWhit

Augustin RUHABURACrooks

Philippe SARRAZINSlim


Lennie est un colosse au cœur tendre mais il est resté à l’état d’enfant, il aime ce qui est doux au toucher, et se balade avec dans sa poche une souris morte de l’avoir trop caressée. Son ami George le protège, il essaie tant bien que mal de limiter la casse, et c’est ce qui les a conduit à fuir le dernier emploi, ils ont évité le pire. Ils sont à nouveau sur la route en Californie, et trouvent enfin un emploi de saisonnier chez Curley.

Ils font connaissance avec les autres employés ainsi que de la femme de Curley, gentille, un peu allumeuse pour se persuader d’exister, ne rêvant qu’à travers les magazines de cinéma. Elle n’a épousé Curley que pour fuir sa vie misérable.



Le rêve des deux hommes, c’est d’avoir un ranch à eux, ne plus dépendre de personne, Lennie pense déjà à l’élevage des lapins, c’est si doux au toucher…

Il y a aussi Crooks, le palefrenier noir, comme on ne veut pas de lui dans la chambrée, il vit dans l’écurie et n’autorise personne à entrer chez lui. C’est son domaine et il le défend.
Candy est le plus âgé, il a un très vieux chien malade, et quand on l’abattra, ce sera un terrible choc pour lui, à se demander s’il n’aurait pas le même sort, parce qu’il ne sert plus à grand-chose depuis son handicap. C’est pourquoi il propose à George ses économies, à la condition qu’ils le gardent avec eux dans leur ferme.



Le rêve commun à tous ces personnages, posséder quelque chose et surtout accéder à la liberté, et ne plus être seuls. Steinbeck peint la dure réalité de la vie de ces êtres, frappés par le chômage, la dure vie des années 30.

Avec la mise en scène et les décors, on se retrouve bien en Californie, par de chaudes journées d’été, étouffantes.


Les comédiens sont crédibles, touchants, drôles parfois, et très investis dans leurs personnages.

mercredi 21 novembre 2012

Exposition d'une femme - Frischer - La Tempête



Exposition d’une femme
Lettre d’une psychotique à son analyste
d’après Blandine Solange
adapté par Dominique Frischer

Version scénique et mise en scène Philippe Adrien
Marie Micla et Patrick Démerin

Une femme dessine avec frénésie, ses œuvres projetées en fond de scène, font penser à Egon Schiele. Elle dessine exclusivement des nus masculins, des hommes rencontrés dans des bars, dans la rue. Dans le même temps, son psychanalyste lit sa lettre, dans laquelle elle se confie comme jamais elle ne l’avait fait auparavant.

Blandine Solange issue d’un milieu modeste a tout fait pour réaliser son rêve d’artiste. Elle est diplômée de l’Ecole des beaux-arts de Marseille, mais pour vivre de son art, elle ne trouve que des emplois de vendeuse ou serveuse. Elle était maniaco-dépressive, son thérapeute n’a pas su détecter à temps son passage à l’acte. Elle s’est pendue.

La mise en scène efficace de Philippe Adrien nous brosse le portrait de cette artiste, qui dans ses délires se couvrait de peinture, sortait nue, qui aimait à se comparer à Camille Claudel. Solange a choisi son destin. Les interprètes sont à la hauteur de cette pièce sans tomber dans le pathos.

Camille Claudel, Van Gogh, Soutine, Séraphine de Senlis ont souffert de troubles psychotiques et connu des destinées tragiques, doit-on faire le parallèle entre l’art et la folie ? c’est le débat qui s’ouvre après avoir vu ce spectacle.

Belle du seigneur - Cohen - La Tempête



Albert Cohen (1895 – 1981)

Mise en scène : Jean-Claude Fall et Renaud Marie Leblanc.

Ce monument de la littérature française dont Joseph Kessel disait que « c’était le chef d’œuvre absolu » du 20ème siècle, a inspiré comédiens et metteurs en scène. Après les « soliloques de Mariette » - l’histoire d’Ariane et Solal racontée par la servante dévouée et aimante d’Ariane -, un autre monologue nous est présenté au théâtre de la Tempête. Ariane d’Auble, cette femme-enfant, qui se raconte des histoires dans sa baignoire, ne se doutant pas que Solal, grimé, entend tout … et attend son heure.

Roxane Borgna joue Ariane intensément, elle coule avec délice dans l’eau, s’ébroue, s’étire, se tend comme un arc juchée sur les bords de la baignoire. Cruelle mais drôle lorsqu’elle raconte ses nuits sans plaisir avec Adrien, exaltée quand elle parle de Solal, de sa sexualité enfin découverte, de son désir d’absolu, mais surtout de sa soif de reconnaissance sociale qui la conduira au bout de l’enfer.

Un grand moment de théâtre nous est offert.

Réservez avec Billetreduc 

jeudi 15 novembre 2012

La putain de l'Ohio - Levin - Théâtre de l'Aquarium



Texte français de Laurence Sendrowicz

Mise en scène Laurent Gutmann
Avec Guillaume Geoffroy, Éric Petitjean et Catherine Vinatier


Ça commence comme une farce, Hoyamer un SDF veut s’offrir pour ses 70 ans une prostituée, cette pensée le stimule ! Mais il mégote sur le tarif demandée par Kokotska, enfin celle-ci parvient à lui soutirer les 100 shekel de la passe,  seulement pour Hoyamer c’est la « débandade » complète...

Le fiston également SDF -  tradition familiale - profitera de l’aubaine, sans plaisir, en n’oubliant pas de reprocher à son père de dilapider son héritage. Ils ne se doutent pas tous les deux que la putain n'est guère respectueuse des traditions.

Le vieil homme lui, rêve de partir pour l’Ohio, lieu divin où vit une « putain » si riche qu’elle ne fait pas payer ses clients. 

Le verbe est cru, quelques scènes hard, mais pas de vulgarité, beaucoup d’humour et de tendresse, cette pièce de Hanokh Levin est portée par des comédiens hors pair qui distillent le texte de Levin avec une jubilation et une vérité grâce à la mise en scène de Laurent Gutmann.


mercredi 14 novembre 2012

Un chapeau de paille d'Italie - Labiche - La Tempête Cartoucherie


La mise en scène de Gilles Bouillon, inventive, pleine de fantaisie et de gags, nous emporte dans un tourbillon et ne nous fait pas oublier, que Labiche nous fait rire certes, mais ses portraits de bourgeois de Paris ou province sont dessinés au vitriol. 


Fadinard jeune rentier, est tout heureux, le jour de ses noces est enfin arrivé, il se prépare à épouser sa chère Hélène fille de Nonancourt pépiniériste, mais Cocotte, vient de se régaler au bois de Vincennes d’un chapeau de paille,  pour  dédommager la dame, il lui a lancé 20 francs ou 20 sous… Hélas, l’amant de cette dernière ne l’entend pas de cette oreille et parvient avec elle à s’introduire de force chez le jeune homme, non pas pour un remboursement mais pour qu’il achète un chapeau identique sous peine de représailles !

Nous voilà pris dans une course infernale, « partons », « courons », toute la comédie est là, quiproquos, poursuites, le pauvre Fadinard, suivie par toute la noce, qui ne comprend pas bien où ils mettent les pieds, confondant la boutique de la modiste avec la mairie, prenant la salle à manger de la Baronne pour l’auberge…

(MENTIONS OBLIGATOIRES : PHOTOS LIBRES DE DROITS
COPYRIGHT / F. BERTHON)

Les comédiens sont heureux de jouer, les décors sont astucieux (chez Fadinard un papier peint à fleurs ou à motifs de cheval, chez la Baronne, une partition de musique est en fond, chez la modiste, des motifs de chapeaux), les costumes sont beaux. Tout ceci accompagné de musique comme toujours chez Labiche.

Quel beau chapeau que voilà ! Je vous invite à courir l’essayer à la Tempête !