Avec Emilie Chevrillon
C’est le chaud et froid avec elle, sévère ou souriante, un peu obsédée sexuelle aussi !
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copyright Alejandro Guerrero et Hughes Marcouyau |
Mes coups de coeur sur le spectacle vivant: théâtre classique, contemporain, cirque, marionnettes, musical, pour les grands et pour les enfants ! Membre de l'Association professionnelle de la critique, Théâtre, Musique et Danse
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Avec Philippe Rebbot, Quentin Baillot, Laure Descamps, Romain Bertrand,
« Les méfaits du tabac », ou les méfaits du mariage ? c’est ce qu’on pourrait penser en voyant Nioukhine le conférencier, mal à l’aise, commenter sa vie personnelle au public. Son épouse, un vrai dragon, le malmène, se moque de lui, elle tient un pensionnat de jeunes filles, et lui a demandé de parler des méfaits du tabac…
« Une demande en mariage », Lomov saute le pas et décide de demander la main de Natalia, sa voisine. Il est hypocondriaque, se plaint de tout mais il a 35 ans et il est temps de se caser ! Tchouboukov est heureux (de se débarrasser de sa fille ?) et il court chercher Natalia, mais ne lui dit pas le pourquoi et c’est bien là le problème, tout va se gâter !
« Un drame », c’est en effet un drame pour l’écrivain Vassiliévitch qui ne songe qu’à lui, mais pour se débarrasser d’une importune, il accepte pour son malheur de recevoir une apprentie auteure, Mme Mourachkine, qui se pique d’écrire une pièce de théâtre !
Toujours un plaisir de retrouver sur scène les
nouvelles de Tchekhov, c’est mené avec finesse et humour, un abattage et un
dynamisme dus aux talents des comédiens et la mise en scène déjantée de Pierre
Pradinas.
Le Chatelet a eu la bonne idée de remonter ce spectacle, distribution de choix, mise en scène et chorégraphie revisitées.
Le décor, modulable, représente aussi bien les immeubles de New York, les rues, les entrepôts, le bar.
Tout est prêt pour opposer les Jets et les Sharks, l’immigration blanche contre les portoricains.
Oui mais voilà, l’amour va jouer des tours à ces jeunes gens, Roméo et Juliette en 1950 dans les quartiers pauvres. Deux jeunes qui s’aiment malgré tout ce qui les oppose, c’est intemporel.
On retrouve les tubes «Tonight », « Maria », « America » … les jupons bariolés virevoltent, les garçons font tourbillonner les filles. Ils affrontent la police, font des blagues au sergent mais hélas, cherchent la grande bagarre avec la bande rivale.
Jadon Webster, Melanie Sierra, Kyra Sorce, Antony Sanchez et Taylor Harley sont excellents, les autres interprètes ne déméritent pas bien au contraire, et Grant Sturiale a superbement dirigé l’orchestre.
Un grand spectacle qui vous laissera ébloui et on sortira de la salle au
son de « mambo ! ».
Le repas des fauves
D'après l'œuvre de Vahé Katcha
Adaptation et mise en scène : Julien Sibre
1942, c’est l’Occupation. Sophie fête son anniversaire, Victor son mari a
invité leurs amis.
Il y a Pierre revenu aveugle de la Grande Guerre, Françoise, veuve de guerre, Vincent
professeur de philosophie, Jean-Paul le docteur, il a quelques dignitaires
allemands parmi sa clientèle. André parfaitement à l’aise dans sa collaboration
avec les allemands, il a l’arrogance de la richesse, et apporte avec lui une
valise bourrée de victuailles et Champagne, personne n’est dupe et accepte sans
vergogne, les temps sont durs, mais ce soir c’est fête !
La soirée se déroule agréablement, soudain on entend des coups de feu… deux officiers SS ont été abattus devant l’immeuble. C’est la confusion totale, bien entendu les allemands sous le commandement de Kaubach investissent l’immeuble et prennent deux otages par appartement. Il est client dans la librairie de Victor, et en « homme du monde » propose aux amis de choisir deux otages parmi eux.
Bien entendu, personne ne veut se livrer et nous assistons à un festival de veuleries, hypocrisies, règlements de compte entre « amis ».
Le sujet est noir c’est vrai, mais on rit beaucoup, en fait qui sommes nous pour juger et surtout qu’aurions-nous fait à leur place ? Julien Sibre a réalisé une mise en scène dynamique et tous les interprètes sont excellents.
Vahé Katcha est décédé en janvier de cette année,
quant à la reprise de cette pièce, elle avait été retardée par le confinement
et c’est un vrai bonheur qu’elle puisse être de nouveau jouée !
Le bateau pour Lipaia
Alexeï Arbuzov
(adaptation Jean-Pierre Hané)
Mise en scène Gil Galliot
Avec Bérengère Dautun et
Emmanuel Dechartre
Au sanatorium, le médecin Rodion Nicolaïevitch a fort à faire avec Lidia Vassilievna, celle-ci perturbe ses camarades de chambrée, elle est insupportable !
La rencontre est houleuse, Lidia est indépendante et le fait savoir, Rodion lui est le médecin chef et il n’a pas l’intention de céder d’un pouce ! La suite n’est guère encourageante pour faciliter l’amitié…
Lidia ment comme elle respire, le pauvre Rodion ne sait pas à quoi s’en tenir, mais petit à petit, en finesse, ils s’apprivoiseront, on le verra dans le soin qu’ils porteront à se vêtir un peu mieux, en somme à vouloir plaire à l’autre sans en avoir l’air. Enfin à se dire la vérité sur leur passé.
Emmanuel Dechartre est un émouvant Rodion face à la fantasque Bérengère Dautun, dans une mise en scène sympathique et joyeuse de Gil Galliot.
Embarquez donc pour Lipaia !
L’heure des assassins
Julien Lefebvre
Mise en scène Elie Rapp et Ludovic Laroche
Avec Stéphanie Bassibey, Pierre-Arnaud Juin, Ludovic Laroche, Ninon Lavalou, Jérôme Paquatte et Nicolas Saint-Georges
Covent-Garden, le 31 décembre, sous le règne d’Edouard
VII, une réception dans un des salons du théâtre. C’est l’entracte et le champagne
est servi avec de délicieux boudoirs. Katherin Belgrave est d’une gaieté, elle
entonne joliment un air. Elle a convié Bram Stoker directeur du théâtre,
Georges Bernard Shaw l’écrivain, Hartford bras droit de son frère Philip
Somerset, ainsi que la charmante Miss Lime sa secrétaire dévouée.
Mais malheureusement on ne pourra pas souhaiter une belle année à Somerset, on le découvre mort, il a laissé un message…
Stoker, Shaw et Doyle auront bien du mal à découvrir l’assassin, il y aura de fausses pistes, nos trois compères sauront-ils déjouer les plans machiavéliques de l’assassin ! Sauront-ils en plus mettre de côté leurs disputes, ça c’est autre chose !
Enfin, voici une bien divertissante histoire, on a plaisir à retrouver nos amis depuis « Le cercle de Whitechapel » et « Les voyageurs du crime ». Les décors et les costumes sont soignés, les interprètes excellents.
N’attendez pas les douze coups de minuit pour profiter de cette enquête !
L’os à moelle
Textes de Pierre Dac
Mise en scène Anne-Marie Lazarini
Avec Cédric Colas, Emmanuelle Galabru et Michel Ouimet
En 1938, Pierre Dac publie le 1er numéro de « L’os à moelle », pourquoi ce titre ? et pourquoi pas répondit-il !
Les trois compères sur scène, entourés de maquettes du journal, (Un titre m’a bien plu « la chasse est ouverte, prévenez le gibier »), ils se livrent donc à la lecture d’articles, et surtout à réclamer à Monsieur Hitler sa participation à l’abonnement, celui-ci à l’air de ne pas comprendre…
On a droit aussi aux petites annonces, toutes aussi farfelues les unes que les autres, et les recettes de cuisine comme « la charlotte aux pommes » façon Werther… par contre j’attends toujours celle des cerises à l’eau de vie !
Pierre Dac c’est le maître absolu de l’absurde, du non-sens, sans vulgarité, loufoque, et dans ces temps obscurs il fallait bien cette bulle d’air.
En 1940 « L’os à moelle s’est dissous au contact du vert-de-gris » et Pierre Dac a rejoint Londres et le Général. Il reviendra à la Libération, et rencontrera au cabaret son complice Francis Blanche.
Un spectacle réjouissant, une superbe scénographie
de Anne-Marie Lazarini, qui vous dilate la rate grâce au talent de Cédric
Colas, Emmanuelle Galabru et Michel Ouimet.
Bunker
Christian Siméon
Mise en lecture Johanna Boyé
Avec Julie Depardieu et Stefan Druet Toukaïeff
Christian Siméon écrit sous forme épistolaire, la vie de Magda Goebbels, son ascension et sa chute terrifiante.
J’ai été surprise par le parti pris de cette pièce ou de cette lecture,
comment dire, on ne sait plus. La sympathique Julie Depardieu a du mal à entrer
dans la vilaine peau de Magda, de plus, la scénographie pour moi n’est pas cohérente,
les dernières minutes devraient être denses, la dernière lettre étant écrite à
son amie, elle n’a plus lieu de tenir son texte et le face à face avec Joseph,
quand elle lui apprend qu’elle a tué leurs enfants, enlève le côté tragique de
la scène.
J’avais vu un documentaire sur Magda, la première dame du Reich, en effet,
belle et élégante, mais glaçante, elle n’a pas hésité à laisser partir son
beau-père en déportation, rien à voir avec cette version édulcorée.
Sacha Danino
Mise en scène Ned Grujic
Avec Juliette Galoisy, Dominique Bastien, Alexandre Guilbaud et Thomas
Marceul
Le meilleur ami d’Alexandre lui offre une biographie sur les Guitry, par magie, dès qu’il ouvre le livre, Lucien et Sacha entrent en piste ! Ce qui permet des effets assez drôles de mise en scène.
Mais… j’avoue m’être ennuyée, problèmes familiaux, problèmes de couple, du déjà-vu.
Le sujet de la pièce, c’est l’éternel duel entre
père et fils, Sacha Danino a choisi les Guitry comme référence.
Les interprètes sont excellents et j’espère les retrouver dans une autre pièce avec un texte original.
C’est fini de rire, on ferme !
Seul en scène de Popeck
Le rideau s’ouvre, sur l’écran au fond on projette
un extrait de « Rabbi Jacob » et l’on découvre Popeck face à de
Funès, et aussi un extrait de l’émission de Jacques Chancel, François Truffaut parlant
de notre vedette et de l’humour juif.
Enfin, notre héros arrive, chapeau melon vissé sur
la tête, pas pressé, boit un coup, naturellement nous engueule « après
tout quand vous arrivez au bureau, vous ne commencez pas tout de suite » (ce
qui est vrai en ce qui me concerne !)
Et puis, Popeck puise dans ses souvenirs, ses « chers disparus » son père, sa mère déportée, et aussi l’admiration pour Devos, Brassens, dont il détourne sans problèmes les textes ! Ah les blagues de Popeck, l’air de rien, avec son air sérieux, il en balance des vertes et des pas mûres...
Anciens sketchs ou nouveaux, son irrésistible
accent. Ses caleçons molletonnés bien entendu, à côté des strings qui ne
cachent pas grand-chose. Et puis c’est un sportif, voyez comme il pratique le
golf en salle, attention aux têtes...
Enfin le temps passe bien vite et on n’a guère envie de le quitter notre
Popeck !
Leonore Confino
Mis en scène par Julien Boisselier
Avec Caroline Anglade, François Vincentelli, Eric Laugérias, Jeanne
Arènes
Miroir joli miroir…
Théophile se regarde dans le beau miroir 17ème siècle qu’il vient d’acheter, il a de quoi s’inspirer, combien de personnages se sont contemplés, ce miroir a tant de choses à dire sans doute. Curieusement, sa femme et son frère n’aiment guère voir leur reflet et sont même effrayés…
Notre héros est écrivain, son inspiration s’épuise et les ressources du ménage aussi, c’est ce que lui fait remarquer sa femme.
Théophile a sorti un petit roman, joli conte sur les mollusques et
crustacés, mais voilà c’est la catastrophe, chaque membre de la famille pense
se reconnaitre dans les personnages !
Ce soir, ils reçoivent le frère et la belle-sœur, et ce sera règlements de comptes et surtout secrets de famille et non-dits.
J’aime beaucoup l’univers et les mots de Leonore Confino, mais je suis un peu déçue par cette pièce, l’histoire du miroir aurait mérité d’être développée. Les secrets de famille, on a déjà vu.
L’interprétation est honnête, mais par contre trop de cris et une diction
approximative !
théâtre de l'Oeuvre
Les pigeons
Mise en scène par Jean-Louis Benoit - Assistant à la mise en
scène Éric Supply
Ah les jeunes rêvent tant de devenir comédiens, vedettes surtout, que ne ferait-on pas pour se trouver devant les projecteurs ou sur scène !
Et bien voilà l’histoire ou les mésaventures de Serge et Bernard, ils attendent dans un appartement pour passer un casting. Ils sont copains, mais on devine la rivalité.
L’attente est longue, mais ils ne sont pas au bout de leur surprise !
Certes, le sujet a été déjà débattu, Michel Leeb est toujours drôle dans ses imitations, et Francis Huster lui donne parfaitement la réplique, je n’oublie pas Chloé Lambert qui apporte sa touche de glamour et de vengeance (je ne vous dirais rien) et Philippe Vieux, encore plus surprenant.
Au final, quel souvenir garde-t-on d’un acteur ? pas grand-chose, les générations passent et on pense plus souvent aux personnages et aux auteurs.
Le succès de cette pièce découle surtout de l’amitié
et de la sympathie que l’on éprouve envers les comédiens.
Moi et François Mitterrand
Hervé Le Tellier
Mise en scène Delphine
de Malherbe
Avec Christophe Alévêque
Une pièce cossue, un bureau, et on distingue un mug à l’effigie de la reine d’Angleterre, une carafe, tout l’équipement du conférencier ! le voici qui arrive, mal à l’aise, accrochant son pardessus au porte-manteau. Il est un peu maniaque Hervé, la lampe au-dessus de lui n’est pas dans son axe…
Enfin, il nous confie sa surprenante amitié avec le locataire de l’Elysée. En 1983, Hervé en vacances à Arcachon, ne résiste pas à adresser au Président de la République, une carte postale, le félicitant (un peu en retard) de son élection de 1981 !
De cette simple carte,
la vie d’Hervé va changer, il reçoit quelques mois plus tard une lettre à
l’en-tête de la Présidence ! S’ensuit une correspondance entre eux,
Hervé lui raconte tout, sa vie privée, ses ennuis professionnels, il recevra la
même circulaire jusqu’en 1996… Malgré tout, Hervé sûr de lui continuera sa
correspondance non seulement avec François mais avec Jacques, Nicolas, François
et même Emmanuel !
Une histoire drôle sur les mécanismes de l’inconscient, de l’imaginaire, de la politique, on rit beaucoup sur les réflexions acides d’Hervé concernant les premières dames !
Christophe Alévêque réussit à émouvoir, à nous faire rire, grâce à la mise en scène subtile de Delphine de Malherbe.
L’antichambre
Jean-Claude Brisville
Mise en scène Tristan Le Doze
Avec Céline Yvon, Marguerite Mousset, Rémy Jouvin
Paris 1750, Madame du Deffand s’entretient avec le Président Hénaut, ils sont amis/amants depuis quelques années, leur conversation n’a pas l’heur de plaire à la marquise, qui s’ennuie. Il est vrai que sa santé décline, elle perd la vue. Cultivée, intelligente, mais ne supporte pas la concurrence…
Marie engage sa « nièce » fille naturelle de son frère, cette jeune personne se nomme Julie et lui tiendra lieu de lectrice, le Président Hénaut n’est pas insensible au charme de la jeune personne.
Julie de Lespinasse participera, sans rien révéler de sa naissance, aux salons de sa tante, elle y côtoiera des esprits brillants, et comme elle, attirés par les nouvelles idées. Sa jeunesse est un atout et Madame du Deffand s’aperçoit bien vite mais bien tard, que Julie est intelligente et charme l’auditoire ! Il s’ensuivra un duel sans merci entre les deux femmes.
Toujours ravie d’écouter les textes de Jean-Claude Brisville, c’est toujours brillant. La mise en scène de Tristan Le Doze est sobre, grâce aux lumières qui déclinent, changent, on devine le désarroi de Marie.
Marguerite Mousset est une Julie charmeuse, vipérine, sans scrupules et dotée d’une fort jolie voix, Céline Yvon sait être méchante et si désarmée, Rémy Jouvin est un truculent Président, qui apporte légèreté et gourmandise !
Un beau spectacle dans ce joli bijou qu’est le
théâtre du Ranelagh.