La visite de la vieille dame (1956)
Friedrich Dürrenmatt (1921 – 1990)
Scénographie et mise en scène Christophe Lidon
- Yves Gasc: Koby et Loby, les aveugles
- Simon Eine: Le Majordome, le Médecin
Nüsslin et Helmesberger
- Gérard Giroudon: Le Maire
- Michel Favory: Le professeur Kühn
- Christian Blanc: Le Commissaire Hahncke,
un client de l’épicerie et le Reporter télé
- Céline Samie: Mme Ill
- Christian Gonon: Moby, Hoby et Voby
septième, huitième et neuvième maris
- Danièle Lebrun: Claire Zahanassian
- Samuel Labarthe: Alfred Ill
- Noam Morgensztern: Karl fils d’Alfred
Ill, le Gymnaste, le Chef de train, un journaliste, le Caméraman et
l’Employé hôtel de ville
- Didier Sandre: Le Pasteur et le Peintre
Hauser
- Pauline Méreuze: Erica, fille d’Alfred
Ill, la femme du maire, une cliente de l’épicerie, la serveuse de
l’auberge et une journaliste
Clara revient au pays, ce n’est pas n’importe qui, elle est
née à Güllen, elle est milliardaire, et les notables du pays veulent l’accueillir
en grande pompe. Il y a aussi et surtout son ami d’enfance, Alfred, ils ont été
amoureux, mais l’un a choisi la fille de l’épicier, et l’autre collectionne les
maris qu’elle jette aussi vite épousés !
Le village est très pauvre, les usines ont fermé, il y a le
chômage et tous n’ont qu’une idée en tête, soutirer de l’argent à l’enfant du
pays. Pour cela ils comptent sur Alfred pour attendrir la milliardaire.
Mais voilà, après les discours pompeux, les dégoulinades de
sucreries en tout genre, Clara leur raconte son histoire, il y a 45 ans, elle a
quitté le pays sous les quolibets des « braves gens », enceinte et mis
au banc de la société, par la faute d’un homme, Alfred. Celui-ci pour ne pas
reconnaître l’enfant qu’elle portait, a soudoyé deux hommes qui ont prétendu au
tribunal avoir été ses amants …
Clara froidement, leur propose un marché : un milliard à
partager entre la ville et chaque habitant, la condition, Alfred doit mourir,
il doit payer. Elle se venge ainsi cruellement de la vie dure qu’elle a menée,
de la mort de leur enfant, de son désespoir.
Bien entendu après la stupeur vient l’indignation, le maire
déchire le contrat, mais Clara ne s’en offusque pas, elle patientera et s’installe
au village.
Peu à peu, la cupidité l’emportera, Alfred ne trouvera nulle
part ni appui moral, ni protection policière, pas de réconfort dans sa propre
famille. Au contraire, il se rendra compte bien vite que tous ont déjà leur
projet, des vêtements neufs, de nouvelles chaussures, une nouvelle cloche pour
le Temple, une machine à écrire dernier cri pour la Mairie.
Il y a du cynisme et aussi une certaine poésie, comme la
promenade en voiture, la dernière qu’Alfred fait avec ses enfants et sa femme (qui
a déjà acheté un manteau en renard…) la route de campagne qui défile
paisiblement.
Clara est dure, cynique, mais elle ressent encore des
sentiments pour cet homme qui l’a reniée, on le voit dans une scène où elle le
retrouve par hasard dans le bois, ils égrènent leurs souvenirs avec tendresse
et humour.
Le pasteur, le maire, le professeur tous devront vivre avec
cette lâcheté, la pauvreté, la misère, rien ne justifie un acte aussi abject.
Danielle Lebrun, vieille dame indigne,
gouailleuse et venimeuse à souhait, Samuel Le Bihan a le triste privilège d’être
la victime et il en sort grandi. La mise en scène de Christophe Lidon ne laisse
rien au hasard avec une direction d’acteurs intelligente.